samedi 20 juin 2015

Les mensonges de la firme Orange pour justifier sa complicité dans les crimes de guerre d’Israël

Orange tire profit des colonies israéliennes dans la Cisjordanie occupée.
Face l’évolution de la campagne internationale de boycott, le président-directeur général du géant français de la télécommunication, Orange, affirme que son entreprise veut mettre fin à ses liens avec sa filiale israélienne Partner Communications. Toutefois, Stéphane Richard affirme qu’en raison d’obligations contractuelles, le retrait ne sera pas possible. C’est une excuse bidon.
« Croyez-moi, si j’avais la possibilité, j’aurais procédé à la résiliation du contrat dès demain, » a-t-il souligné mercredi depuis le Caire, en marge de l’interview qu’il a accordée à son arrivée mercredi à Daily News Egypt dans le cadre d’une conférence de presse visant à désamorcer la situation de boycott qui ne cesse de frapper sa filiale Mobinil.
Ses déclarations et commentaires ne sont pas passés inaperçus et ont provoqué une réaction violente des responsables israéliens.
Pour rappel, BDS Egypte a lancé, le mois dernier, une campagne de boycott de Mobinil, détenue à 99% par Orange.
Avec au moins 33 millions de clients pour Mobinil, l’Egypte est considérée comme l’un des plus grands marchés de la société française.

Tirer profit des crimes israéliens

Orange est présente en Israël à travers un contrat de franchise avec la société privée Partner Communications Ltd. Cette dernière verse des royalties à Orange et une part de ses bénéfices pour l’utilisation du nom de la marque.
D’après une enquête publiée le mois dernier par une coalition franco-palestinienne d’organisations syndicales et des droits de l’homme, Orange participe, aux termes de cet accord, aux violations systématiques des droits des Palestiniens.
Le rapport indique qu’Orange tire profit des colonies israéliennes dans la Cisjordanie occupée puisque Partner opère dans des centaines de tours de communication et autres infrastructures dont la plupart sont bâties sur des terrains privés confisqués aux Palestiniens.
Mais la chose qui a sans doute suscité la plus grande indignation est le fait qu’Orange Israël soit le commanditaire direct et officiel de deux unités militaires israéliennes, l’une d’entre elles n’est autre que la brigade blindée Ezuz qui a pris part à quelques épisodes les plus sanglants de l’offensive lancée l’été dernier contre Gaza et qui a tué plus de 2200 Palestiniens.
Fait remarquable, le gouvernement français détient le quart des parts d’Orange, ce qui fait de lui un bénéficiaire direct des activités économiques dans les colonies qu’il [gouvernement français] juge pourtant illégales.
Directement ou à travers ses filiales, Orange compte environ 250 millions clients dans des dizaines de pays et opère par le biais de divers accords de propriété : en Grande-Bretagne sous le nom de EE, en Belgique en tant que Mobistar, au Maroc sous le nom de Médi Télécom et en Irak sous le nom de Korek Telecom.
En France, en Espagne, en Jordanie et en Tunisie, pour ne citer que ceux-là, la société garde le nom de marque « Orange. »

Société appartenant à un milliardaire anti campagne BDS

Ironie du sort, l’actionnaire majoritaire de Partner est le milliardaire israélo-américain Haim Saban qui s’est associé avec le magnat des casinos Sheldon Adelson pour convoquer un sommet secret des « méga donateurs Juifs » à l’effet de combattre le mouvement de Boycott, Désinvestissement et Sanctions, BDS.
Réagissant aux commentaires de Richard, Saban a déclaré qu’il était fier de posséder Partner et qu’il ne se laisserait jamais « dissuader par les menaces. »

Un énorme risque financier

Le président-directeur général d’Orange, Stéphane Richard, a allégué que l’accord avec Partner constitue un « héritage » avant qu’Orange ne soit reprise et fusionnée avec France Telecom. Mais l’accord a été renouvelé en 2011 et modifié cette année.
A ce titre, Richard a expliqué : « Nous n’avons pas renouvelé le contrat, nous voulions changer les termes du contrat et inclure une date de résiliation car elle n’existait pas avant et c’est pourquoi, nous n’avions aucune possibilité de cessation du contrat. »
Bien que les clauses du contrat ne soient pas rendues publiques, un communiqué de presse du mois d’avril a révélé que le contrat durera jusqu’en 2025.
Richard a par ailleurs expliqué que toute tentative de résilier le contrat exposerait la société à un « énorme risque financier. »
« La seule autre possibilité serait d’entrer en litige avec le partenaire, et je suis navré de le dire mais entrer en litige lorsque vous ne disposez d’aucun fondement juridique dans les tribunaux israéliens n’est pas une issue que je recommande à mon entreprise, » a-t-il précisé. « Je ne souhaiterais pas payer des centaines de milliers d’euros juste parce que je dois prendre des risques en terme de sanctions. »
Richard a par ailleurs fait des déclarations supplémentaires qui ont été rapportées par l’Associated Press et dans lesquelles il reconnait que le rôle d’Orange en Israël constitue une « question délicate et sensible ici en Egypte, et même ailleurs. »

Pas convaincant

Il y a plusieurs raisons qui font que les excuses avancées par Richard ne soient absolument pas convaincantes.
Il dit qu’Orange ne dispose d’ « aucun fondement juridique » dans les tribunaux israéliens et pourrait encourir de lourdes pénalités si jamais le contrat est résilié avant terme.
Or Orange n’est pas le propriétaire de Partner et a probablement peu d’actifs en Israël qui risqueraient d’être saisis même dans le cas où un jugement défavorable est prononcé par un tribunal israélien.
Par contre, l’atout de taille dont dispose Orange est son nom de marque qui est actuellement terni partout dans le monde à cause de la participation directe de sa filiale israélienne dans des activités criminelles contre les Palestiniens.
Et puis, tout contrat commercial valablement et convenablement établi inclura une clause de sortie pour force majeure, ou bien si l’une des parties s’implique dans une activité criminelle.
Et même si les tribunaux israéliens n’incriminent pas l’occupation, la colonisation et les crimes, Orange pourrait sans l’ombre d’un doute présenter l’affaire devant un tribunal français ou ailleurs afin de condamner les activités de Partner en Cisjordanie occupée et dans la Bande de Gaza et prouver qu’elles sont illégales en vertu du droit international.

Illégal

Orange pourrait tout simplement déclarer qu’elle n’est pas obligée de participer aux crimes commis par Israël.
L’entreprise pourrait souligner le fait que le gouvernement Français avait mis en garde ses entreprises contre toute transaction commerciale avec les colonies israéliennes dans les territoires occupés.
Et parce que les colonies sont « illégales en vertu du droit international, » le gouvernement français déclare qu’il « existe des risques liés aux activités économiques et financières dans les colonies » y compris « des risques juridiques et économiques. »
Orange est également en mesure de recourir à la nouvelle doctrine de la responsabilité des entreprises pour les violations flagrantes des droits de l’homme.
L’entreprise pourrait, par conséquent, résilier le contrat au motif que Partner l’expose à des risques juridiques et moraux inacceptables.
Orange pourrait non seulement argumenter par le fait qu’il ne doit pas un centime à Partner, mais doit aller plus loin et demander à Partner de compenser et d’indemniser l’entreprise française pour le tort qui entache sa réputation en raison des activités criminelles continues de Partner.
Et pour finir, dans le pire des scénarii, si Orange devait payer des pénalités à Partner, elle devrait avoir une perspective commerciale pour calculer ce qui lui coutera moins cher : réduire ses pertes maintenant ou bien rester complice de l’apartheid israélien et de ses crimes de guerre pour une autre décennie.
Je ne suis pas avocat, je le reconnais, mais malgré cela, je suis capable de trouver et de voir plusieurs issues pour Orange si, bien évidemment, elle est prête et désireuse de tirer un trait sur sa complicité dans les crimes commis par Israël.
Il est inconcevable, voire inimaginable, que les consultants et avocats si bien payés de la société Orange, aient déjà soupesé et examiné avec attention toutes ces options pour le rejeter en conclusion.
En dépit de ce qu’a affirmé Richard, à savoir que les bénéfices en provenance d’Israël sont minimes par rapport à la taille et la stature d’Orange, la seule conclusion raisonnable et acceptable que nous pouvons tirer de sa conférence de presse hâtive au Caire est que tout cela n’est que coup médiatique destiné à atténuer et désamorcer la colère.
Il est clair qu’Orange ressent la pression, à domicile et à l’étranger, mais Richard ne fait que chercher des excuses pour maintenir le statu quo.
Si Orange était sincère, le minimum que Richard aurait pu faire serait d’annoncer que son entreprise consulterait des avocats, le gouvernement français et des organisations des droits de l’homme pour étudier la possibilité de sortir le plus rapidement d’Israël.

Colère israélienne

Bien évidemment, nous avons une autre possibilité : la colère israélienne qu’ont suscitée les déclarations de Richard pourrait pousser l’opinion publique pour précipiter la sortie d’Orange en répondant à Partner par le boycott.
Tzipi Hotovely, le nouveau vice-ministre israélien des affaires étrangères qui croit que le monde doit se soumettre à des justifications bibliques pour l’occupation et la colonisation par Israël, aurait déjà convoqué une réunion de crise pour discuter de la question.
 Ali ABUNIMAH
* Ali Abunimah est l’auteur de The Battle for Justice in Palestine. Il a contribué à The Goldstone Report : The Legacy of the Landmark Investigation of the Gaza Conflict. Il est le cofondateur de la publication en ligne The Electronic Intifada et consultant politique auprès de Al-Shabaka, The Palestinian Policy Network.

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